Licenciée au Stade Français, la Brestoise de 25 ans continue malgré tout de s’entraîner régulièrement au Pole France de Brest situé au Moulin Blanc. Numéro 2 en planche à voile en équipe de France, Lucie Belbeoch rêve d’Or lors des Jeux Olympiques de Paris 2024. Entretien.

La Bretonne est une référence dans sa discipline. Remplaçante de Charline Picon pour les prochains Jeux à Tokyo, elle sait qu’elle n’y participera sûrement pas, mais ça ne semble en rien un souci pour celle qui a désormais les yeux rivés vers Paris 2024. Entre ses débuts en planche à voile, son coup de folie lors du premier confinement, le passage de la catégorie RS:X à IQFoil ou encore sa victoire lors des iQFoil International Games en mai dernier, Lucie Belbeoch n’élude aucun sujet. Toujours avec le sourire et une détermination clairement affichée, la véliplanchiste a accepté de se dévoiler pour Ti Sport. Entretien exclusif.

Ses débuts en planche à voile 

J’ai découvert la planche à voile parce que j’habite pas loin du port de Brest et mes parents avaient inscrit mon frère dans cette discipline. Quand on est jeune, on essaye un peu tous les sports surtout quand nos parents sont sportifs. Et j’ai tout de suite accroché. J’adore être en extérieur plutôt que dans un gymnase ou une piscine. Quand j’ai commencé, on n’était pas beaucoup de filles de mon âge et du coup on s’est bien occupé de nous, car on était techniquement en retard sur les garçons. J’ai participé aux Championnats de France et quand tu es petite et qu’on te dit ça, tu es toujours trop contente. Tu prends quelques médailles et tu continues. J’ai pris goût assez rapidement à la compétition. 

Ensuite j’ai choisi le lycée sport/étude de Kerichen puis Lesven. Après le bac, j’ai encore eu un dilemme entre savoir si je continuais ou si j’arrêtais, mais je me suis dit que ça marchait bien et que je m’éclatais dans ce sport donc j’ai continué. J’ai été à la FAC pour avoir des horaires plus souples pour m’entraîner et je suis rentrée à l’ESCP Paris avec mon statut d’athlète de haut niveau. Tout s’est bien goupillé, car j’ai vraiment pu avancer sportivement et professionnellement. Surtout que c’est très compliqué de vivre de ton sport quand tu fais de la planche à voile. 

« Mon objectif, c’est Paris 2024 »

Sa vie de partenaire d’entraînement de Charline Picon

J’ai dix ans de moins qu’elle ! (Charline Picon à 36 ans) Je suis arrivée à La Rochelle pour m’entraîner et elle était déjà médaillée d’or à Rio. Elle a fait ensuite sa pause maternité. J’ai bien progressé et j’ai intégré l’équipe de France. Je suis devenue sa partenaire en apprenant énormément de choses grâce à elle, car c’est une fille qui a beaucoup plus de maturité sportive que moi. Elle a une sacrée expérience et un très beau palmarès. J’ai pu aller sur le site des JO au Japon avec Charline. On a pu s’entraîner pendant trois ans ensemble et j’espère lui avoir apporté aussi. 

On a dû tout arrêter, car c’est un petit peu particulier, mais ça faisait plus de 15 ans que c’était la catégorie RS:X et ça sera le cas à Tokyo pour la dernière fois, tandis qu’à Paris 2024 on sera en IQFoil. Le report d’un an des Jeux Olympiques a eu un impact sur cette décision donc après c’était compliqué pour moi de continuer à être sur RS:X alors que mon objectif c’est les Jeux à la maison dans trois ans. Charline prépare Tokyo sur RS:X et moi Paris 2024 sur foil. Nos chemins se sont donc séparés. 

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Allier navigation et études de commerce

C’était beaucoup de voyages en train entre Brest et Paris. Il faut être très organisée et hyper clair avec le staff de l’école et des clubs. Bien voir les objectifs et savoir qu’il y a des moments de l’année où tu mets toute ton énergie sur l’école et d’autres moments sur la planche à voile. Il faut être honnête avec soi-même, se fixer des priorités et bien gérer sa fatigue avec des marathons de 4 ans pour nous entre chaque olympiade. Ça l’a plutôt bien fait pour moi, car les profs ont vu que j’étais sérieuse et que j’arrivais à jongler entre les deux. 

« On a pris un aller sans retour pour Nouméa »

Son confinement en Nouvelle-Calédonie

Je n’en ai pas trop parlé, car c’était un peu inconscient. À l’époque, on ne savait pas trop ce qu’était le Covid. J’ai mon frère qui vit là-bas depuis 4/5 ans et j’allais le voir quand j’étais en compétition au Japon. Quand on a eu l’annonce du confinement, avec mon copain qui fait aussi de la voile, on s’est dit « On va en Nouvelle-Calédonie !» On a pris un billet pour Noumea à 22h, à 2h du matin on faisait nos sacs et à 5h on était dans l’avion. J’ai appelé ma mère pour lui dire, elle m’a répondu « Ah ok ». On avait pris un billet aller sans retour. On pensait même être arrêtés à Tokyo, mais on a finalement pu arriver à destination. Là-bas il n’y avait pas le Covid donc ça a été trois mois de liberté où on a pu s’entraîner à fond. On n’a pas trop communiqué là-dessus, mais c’était la meilleure décision possible d’un point de vue sportif.

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Le passage du RS:X au IQFoil

J’adore le foil, c’est bien plus spectaculaire. Il faut être beaucoup plus lourd donc j’ai pris 10kg là récemment. Ça a été compliqué au début, car sur le papier, c’était la galère. Je suis numéro 2 Française en RS:X derrière Charline, et d’un côté j’étais déçue de devoir repartir à zéro en voyant notamment des jeunes très bons sur IQFoil, mais j’avais déjà fait un peu de foil et j’adore vraiment la vitesse. Je m’y suis donc mise rapidement et j’aime trop la planche à voile et le circuit olympique pour arrêter. Tant que je m’éclaterais dans ce sport, je continuerais. 

J’ai pris mes marques sur la planche, car plus tu es lourd, plus tu vas vite. Les garçons en RS:X font 73kg, ils sont passés à 85kg en IQFoil. Moi je suis passée de 55 à 65kg, mais il faudrait que je prenne encore plus de poids. J’ai fait beaucoup de musculation et je mange énormément. Je ne fais plus de fractionné. C’est un peu comme si je changeais complètement de catégorie de poids en judo donc ça a forcément un impact. En plus j’adorais faire attention à mon alimentation et aller courir. Le niveau mondial évolue, car on découvre tous le nouveau support. Ça fait un an environ qu’on est en IQFoil.

« C’est la régate la plus importante de l’année »

Sa victoire aux iQFoil International Games

L’année dernière, j’avais fait l’impasse sur une régate, car je ne me sentais pas encore assez prête pour la compétition. Ensuite, j’ai fait une course en octobre dernier où j’ai terminé 5e, et là cette année, en mai, je gagne en Italie. C’est ma première victoire sur le circuit olympique donc ça faisait forcément super plaisir. Mais rien n’est acquis, car je sais que le niveau va encore augmenter. C’est une très bonne nouvelle, mais il ne faut surtout pas se relâcher. Tout ça m’encourage pour la suite et ça me donne un peu plus de jus. Ça me permet de prendre confiance sur une toute nouvelle discipline.

Les Mondiaux en Suisse en août

Ça va être une compétition très particulière, car on va naviguer sur un lac et non pas sur l’Atlantique. Les courses en foil sont très différentes que ça soit en eau salée ou en eau douce. Le lac est très petit donc on n’aura pas d’entraîneur sur l’eau, ce qui fait qu’on sera en autonomie totale. On va devoir également enchaîner les manoeuvres puisqu’il n’y a pas de longs bords. C’est la régate la plus importante de l’année et c’est une étape vers Paris 2024. D’ici là, je vais m’entraîner à Brest et au lac de Serre-Ponçon (Hautes-Alpes). On ira un peu en avance en Suisse, car c’est un plan d’eau en altitude. Il faudra bien s’acclimater et le niveau sera très bon puisqu’il y aura quasiment tout le plateau des meilleures véliplanchistes sur IQFoil.

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