Anatole Facon était l’un des plus jeunes skippers présents au départ de la 12e édition de la Route du Rhum et il n’a pas démérité, loin de là. Le Morbihannais est revenu sur sa course au micro de Ti Sport.
Comment as-tu vécu ta première Route du Rhum ?
C’était juste génial. Je suis arrivé au bout de trois semaines et c’était trois semaines de pur bonheur. Je n’avais pas forcément anticipé le temps que j’allais passer en mer, mais je l’ai très bien vécu. C’était comparable en quelque sorte à un état de grâce. Courir la Route du Rhum, c’est un don qui est offert à pas grand monde et je m’en suis vraiment rendu compte en naviguant. C’était vraiment fabuleux d’être seul sur mon bateau, en communion avec moi-même. Puisqu’une compétition comme celle-ci, c’est avant tout une course avec soi plutôt que contre les autres.
« Je me rends compte que faire 35e ou 25e, n’aurait pas changé grand-chose à ce que j’ai réalisé »
Anatole Facon
Il s’agissait d’une étape importante dans ta jeune carrière ?
Déjà, c’était une étape cruciale pour finir cette saison. On prépare tout au long de l’année un projet, un bateau et un programme pour la saison et la Route du Rhum était le point culminant. L’objectif était bien évidemment de participer à l’ensemble des courses et pas seulement à la Route du Rhum. Et le point final, c’était de traverser l’Atlantique en arrivant à Pointe-à-Pitre.
Qu’est-ce qui a été le plus dur pendant la course ?
La première semaine de course était un peu complexe. Il y avait des successions de tempêtes violentes. À ce moment-là, le stress était omniprésent, car je ne voulais pas casser le bateau à quelques centaines de milles de la Bretagne. Je pense que c’était vraiment le départ le plus difficile. Et après, j’ai un peu abîmé des voiles qui me servaient au portant. J’ai vu mes concurrents directs me dépasser, ce qui était aussi un coup dur. J’ai dû accepter le fait d’aller moins vite que les autres. Mais au final, je me rends compte que faire 35e ou 25e, n’aurait pas changé grand-chose à ce que j’ai réalisé.
« Peu importe ce qui a pu se passer pendant trois semaines, au moment d’accoster à Pointe-à-Pitre c’était un rêve éveillé »
Anatole Facon
Comment as-tu vécu le fait d’être en solitaire pendant trois semaines ?
J’étais un peu sceptique au moment de partir en mer. J’avais seulement fait deux courses en solitaire cette année durant lesquelles j’avais eu des moments un peu désagréables. J’avais donc peur de ressentir la même chose. Mais au final, j’ai très peu souffert de la solitude et je ne me suis jamais retrouvé au pied du mur comme j’avais pu le vivre lors de mes précédentes courses. Tout au long de cette Route du Rhum, je me suis dit que tout allait bien et qu’il fallait continuer. J’avais l’impression que tout était fluide en abordant toutes les embûches de manière positive.
Quelles émotions as-tu ressenties au moment de franchir l’arrivée ?
Peu importe ce qui a pu se passer pendant trois semaines, au moment d’accoster à Pointe-à-Pitre c’était un rêve éveillé. J’étais heureux, mais aussi un peu ému. J’avais l’impression que mes sentiments étaient arrivés à maturité. Il n’y a donc pas eu vraiment d’explosion de joie. Si j’avais coupé la ligne plusieurs jours auparavant, la situation aurait peut-être été différente. Là, je suis arrivé de manière naturelle et c’est ça qui était vraiment plaisant.
« J’étais halluciné par la qualité de course du groupe de tête »
Anatole Facon
En tant que marin, quel regard portes‑tu sur cette édition ?
J’ai simplement été fasciné de voir ce que les autres skippers ont pu faire. Il y a eu certes les Ultim qui ont mis six jours pour arriver en Guadeloupe, ce qui est juste hors norme compte tenu des conditions climatiques que l’on a pu avoir au début. Et puis dans toutes les catégories, il y a quand même eu de jolis dénouements. Dans ma catégorie en Class 40, je suivais de près les évolutions. J’étais halluciné par la qualité de course du groupe de tête qui est parvenu à maintenir une vitesse moyenne impressionnante.
Le fait d’être jeune a‑t-il été un avantage ou un inconvénient durant ta course ?
Que l’on ait 22 ans ou même 35 ans, le plus important c’est la manière dont on ressent la mer. Il y a des skippers qui sont bien plus âgés que moi et qui n’ont pourtant pas ressenti la même chose. Je pense par contre qu’il peut y avoir une certaine forme d’insouciance liée à l’âge. Pour autant, je ne me suis jamais dit qu’il fallait que je tente des choses irréfléchies juste parce que je n’avais rien à perdre.
« Je suis allé loin dans un état d’euphorie et il faut maintenant que j’atterrisse pour bien repartir »
Anatole Facon
Quelles sont maintenant tes prochaines ambitions ?
Dans un premier temps, j’ai à cœur de faire le point sur tout ce que j’ai pu accomplir cette saison afin de voir où j’en suis. Sans cela, je ne pourrais pas savoir vers où je vais. Je suis allé loin dans un état d’euphorie et il faut maintenant que j’atterrisse pour bien repartir. Ensuite, je pense que je trouverais facilement ce que je veux faire pour mon futur. L’objectif reste malgré tout de continuer d’apprendre pour performer et ce sera sûrement en Class 40.